RAPPEL DU MÉCANISME SEMESTRIEL DU PHENOMENE DES ÉCLIPSES
Pour la plupart des terriens, la Lune n'est guère moins banale qu'un ballon se promenant dans le ciel...
Mais il s'agit en réalité d'une énorme boule de roches, au diamètre dépassant plus du quart de celui de la Terre, pesant 74 milliards de milliards de tonnes, flottant entre Terre et Soleil depuis plus de 4.6 milliards d'années dans un équilibre complexe en trois dimensions, jamais renouvelé à l'identique, dicté par les lois de la gravitation. Échappera -t-elle un jour à la Terre?
Un tel trio est unique dans le système solaire et, en réalité,il faut plutôt parler pour l'ensemble Terre/Lune d'une planète double dont la moins grande n'aura pas pu retenir d'atmosphère, restant, semble-t-il, sans vie bien qu'elle soit, comme sa sœur, dans la zone d'habitabilité du Soleil.
Par une coïncidence extraordinaire, la Lune reste pratiquement 400 fois plus près de la Terre que le Soleil dont le diamètre réel vaut 400 fois le sien. Vus de la Terre, leurs diamètres apparents présentent donc, à très peu près, la même taille, voisine d'un demi degré; en minutes d'arc: 31.5' à 32.5' pour le Soleil et 29.3' à 33.5' pour la Lune. Le diamètre de la Lune peut donc dépasser celui du Soleil ou au contraire lui être inférieur ce qui induit une certaine variété dans les éclipses.
L'orbite instantanée de la Lune ne se situe pas dans le plan équatorial de la Terre mais fait un angle variable, entre 5.0° et 5.3°, avec le plan de l'orbite du Soleil. Les deux orbites se croisent deux fois par an à des dates dénommées nœuds de l'orbite lunaire. Ces nœuds sont animés d'un mouvement très compliqué incluant des retours en arrière. Le Soleil les rencontre tous les 173.3 jours car ils reculent de 18.6 jours en un an.
Les pleines lunes ou nouvelles lunes (ces dernières invisibles en raison du rayonnement solaire) se produisent tous les 29.53 jours, cinq fois sur six loin des nœuds, la Lune étant alors au dessus ou au dessous du Soleil ou de son symétrique. Mais quand elles interviennent à proximité des nœuds, à intervalle de six lunaisons, 177.18 jours, Soleil, Terre et Lune sont plus ou moins exactement alignés.
La valeur de l'inclinaison de l'orbite instantanée 5.3° détermine la durée pendant laquelle, autour d'un nœud, les astres peuvent s'occulter l'un l'autre, au moins en partie. Pour des astres aux diamètres apparents proches de 0.5°, la géométrie montre qu'elle est en moyenne de 17.63 jours avant et après le nœud, soit 35.26 jours en tout; c'est la durée de la saison d'éclipses.
La Lune tourne autour de la Terre en 29.53 jours, durée inférieure au temps que le Soleil met à franchir la saison d'éclipses. Si donc le Soleil s'aventure dans une saison d'éclipses, il recevra inévitablement la visite de la nouvelle lune et sera éclipsé par elle. Il pourra même dans certains cas l'être deux fois dans la même saison...
Mais il existe un quatrième partenaire dans le jeu, c'est le cône d'ombre, infime portion de l'espace proche à l'abri du flux solaire, créé à l'opposé du Soleil par la Terre qui arrête ses rayons.
Pendant que le Soleil parcourt une saison d'éclipses, l'Ombre de la Terre traverse l'autre saison d'éclipses autour du nœud opposé. Durant cette saison-là, la Lune ne peut éviter, quinze jours après l'éclipse de Soleil, d'être à son tour éclipsée par l'Ombre de la Terre lors de la pleine lune.
Un point partout!
La combinaison des mouvements périodiques du Soleil, 365.25 jours, des nœuds, 346.62 jours et des lunaisons, 29.53 jours, rend le calcul précis de la survenance des éclipses extrêmement ardu.
Pour plus d'information sur les éclipses, se référer aux articles du présent blog précisés ci-dessous:
11/02/2015 l'éclipse totale de Soleil du 20/03/2015
11/02/2015 le subtil mécanisme des éclipses de Soleil en série
10/07/2018 les trois éclipses de l'été 2018
" Chaque passage du Soleil en un nœud, tous les 173 jours environ, à six lunaisons d'intervalle en général, donne lieu à deux éclipses, à 15 jours d'intervalle, l'une de Soleil, l'autre de Lune, dans un ordre quelconque. Parfois, une troisième éclipse s'y ajoute, soit de Lune soit de Soleil..."
Paul Couderc, astronome (1899/1981) " LES ÉCLIPSES ", PUF.
" Je suis fort étonnée, dit la marquise, qu'il y ait si peu de mystère aux éclipses..."
Fontenelle (1657/1757) " Entretiens sur la pluralité des mondes " 1686, cité par Paul Couderc.
PANORAMA DE L'ECLIPSE PARTIELLE DE SOLEIL DU 25 OCTOBRE 2022
Sont représentées ici les positions du Soleil et de la Lune, de dix en dix minutes, du début de l'éclipse à 11h17, à sa fin à 13h15, en faisant une pause à l'instant du maximum à 12h11 locale.
Soleil, en jaune, et Lune en noir, se déplacent de l'est - à gauche- vers l'ouest - à droite -...
Évidemment, il n'en est rien: c'est la Terre qui tourne sur elle-même et ses hôtes découvrent progressivement, au fil des minutes et des heures, ce qui se passe dans le ciel, plus à l'est.
La rotation de la Terre autour du Soleil se concrétise, elle, par le déplacement du Soleil par rapport aux étoiles: il "remonte" le ciel vers l'est à raison d'un peu moins d'un degré par jour (360/365.25). . La Lune, bien plus rapide, fait de même au rythme d'environ 13.2 degrés par jour (360/27.32) soit un peu plus que son diamètre en une heure. Vu depuis la Terre le Soleil "tourne" autour de la Terre en 24h en moyenne et les étoiles en 23h et 56 minutes: c'est le temps sidéral.
Au début de l'éclipse, Soleil et Lune sont au coude à coude et à la fin, la Lune est passée devant le Soleil, à l'est.
En bleu fin, la trace du tropique du Capricorne; en rouge fin, celle de la course du Soleil dans le ciel.
A l'instant du maximum, 12h11: en rouge épais, l'écliptique (orbite du Soleil); en gris, l'orbite instantanée de la Lune; en pointillé noir (un point par jour), la marque de la saison d'éclipses s'étendant du 18 octobre au 22 novembre autour du nœud lunaire atteint par le Soleil le 5 novembre.
La figure révèle quelques caractéristiques de l'éclipse:
Le nœud concerné est "descendant" c'est à dire que la latitude de la Lune est positive avant le nœud et négative après. La Lune et le Soleil se rencontrant avant le nœud descendant, l'éclipse est visible dans l'hémisphère nord. Cette rencontre intervenant largement avant le nœud, alors que la Lune présente encore la latitude conséquente de 1.1°, la Terre échappe à l'axe du cône d'ombre de la Lune qui passe au-dessus du pôle nord et l'éclipse n'est que partielle pour tous les terriens.
Quelques autres données: la Lune est à 373.000 km de distance et le Soleil à 148.760.000 km (rapport 398.8). Le diamètre apparent de la Lune est de 32', moindre que celui du Soleil 32.2': si l'éclipse se produisait près du nœud, elle serait annulaire.
La grandeur de l'éclipse, c'est à dire la proportion maximale du diamètre solaire occulté est de 26%.
Si l'on n'est pas averti du phénomène, il passe inaperçu car même éclipsé à 95% le Soleil dispense assez de rayonnement pour que l'atmosphère reste brillante.
Quinze jours après cette éclipse de Soleil, heure pour heure, le 8 novembre, le Soleil prendra sa revanche et l'Ombre de la Terre éclipsera la Lune. A l'éclipse partielle de Soleil dans l'hémisphère nord du 25 octobre se produisant 12 jours avant le nœud descendant, correspondra une éclipse totale de Lune 3 jours après le nœud ascendant.
Cette éclipse, semblable à celle du 16 mai passé observée en Europe, sera visible dans l'hémisphère sud aux antipodes entre 10h09 et 12h49 TU.
Pour consulter les cartes des éclipses de l'année 2022, se référer à l'article du présent blog en date du 23/12/2021, intitulé "année 2022 éphémérides graphiques et quelques phénomènes".
Les séries courtes d'éclipses: aperçu
En 2021 les deux paires d'éclipses étaient séparées de 177 jours (six lunaisons) et se sont produites dans le même ordre: LUNE puis SOLEIL. La paire suivante, première de 2022, est intervenue le 30 avril 2022, 162 jours plus tard seulement (5 lunaisons et demi), l'ordre des astres se trouvant inversé: SOLEIL puis LUNE. La paire suivante du 25 octobre 2022 retrouve l'écart de six lunaisons et conserve le même ordre. En 2023 même écart et même ordre pour les deux paires. En 2024, avec la première paire, le 25 mars, on revient à un écart de 162 jours avec inversion de l'ordre...
Et ainsi de suite avec un rythme de quatre en quatre paires, appelé série courte d'éclipses.
Sauf qu'une paire devient un triplet suivant un double rythme irrégulier ce qui induit alors que l'avance d'une demi lunaison se produit à la fois sur la première et la quatrième paire qui devient ainsi la première paire (triple) de la série suivante. Ce fut le cas en 2018 et 2020 et ce sera le cas en 2027, 2029, 2031 puis en 2036 et 2038, puis en 2047 et 2049...
