cadran de berger (ou pyrénéen) |
Le cadran de berger, assez rustique, peut être emporté facilement dans sa poche par le gardien du troupeau, qui peut le consulter sans connaître les points cardinaux. En plus, il est particulièrement bien lisible pendant la saison d'estive, d'avril à septembre. Mais il perd sa précision si on s'en sert à la fois en Crau et dans les Alpes du nord...
Sa construction se fait par points calculés avec la fonction tangente. Les spirales ont belle allure et le font un peu ressembler à l'enseigne des barbiers...
On le tient suspendu par son fil, le style horizontal dirigé vers le soleil. L'ombre de l'extrémité du style marque l'heure sur l'abaque.
détail du tableau des ambassadeurs peint par Holbein le Jeune |
Une version de table reprend en déroulé les lignes tracées sur le cylindre. Cette sorte d'oriflamme est alors orientée perpendiculairement à la direction du soleil.
cadran de berger, modèle pour salon |
Sur ce cadran ont été dessinées deux lignes de 12h, l'une en rouge correspond à la période du solstice d'été au solstice d'hiver et l'autre en bleu à la période inverse. En effet la loi des aires a pour conséquence que, pour des jours symétriques, la valeur de la déclinaison est différente.
Un autre cadran présentant son style horizontal dans la direction du soleil est mentionné par l'amiral Fantoni dans son opus "orologi solari" (il faut souhaiter que la récente réforme de l'orthographe italienne ne soit jamais copiée pour la française...)
cadran Fantoni |
Le disque vertical est tourné de telle sorte que la date du jour occupe le point bas puis il est orienté face au soleil. Les lignes calculées sont équivalentes à celles du cadran de berger.
Les lignes horaires de ces cadrans à style horizontal mettent en jeu la fonction tangente de la hauteur, d'où leurs courbes harmonieuses mais difficiles à tracer.
Une idée remarquable a conduit à bâtir les lignes horaires directement sur la valeur de la hauteur sans passer par une fonction trigonométrique. Il faut utiliser pour cela un cylindre étroit, sorte d'anneau , tenu verticalement par un fil. Cet anneau est percé, à une distance angulaire du point de suspension égale à la latitude, d'une lumière (la bien nommée) par laquelle passe le rayon du soleil. Cette lumière remplace le style. Au lever du soleil la tache lumineuse du soleil se trouve au point symétrique de la lumière, puis elle descend à une distance angulaire, mesurée depuis ce point, égale au double de la hauteur du soleil. Ce cadran est appelé anneau de paysan.
Le dessin, en coupe, de l'anneau ressemble à un œil. La rétine en rouge est l'arc utile au solstice d'été et celle en noir au solstice d'hiver.
A l'intérieur de l'anneau on peut graduer les lignes horaires en fonction de la date mais alors on ne gagne rien en facilité d’exécution comme le montre la figure ci-dessous.
anneau de paysan et abaques fonction de la date ou de la déclinaison |
Mais si on retient une graduation en fonction linéaire de la déclinaison on obtient des lignes horaires très proches de segments de droite d'où une remarquable facilité d'exécution. Pour 9h on a tracé sur la figure ci-dessus la droite approchée, celle retenue par les constructeurs de tels objets, les véritables courbes étant en vert.
En effet, en raison des particularités de la trigonométrie sphérique (sa magie?), il existe des quasi-relations remarquables entre les valeurs de la hauteur notée h, de la déclinaison notée d et de l'angle horaire noté H. En un lieu de latitude donnée, pour toute valeur de l'angle horaire H on peut calculer la hauteur, notée he, du soleil à ce moment le jour de l'équinoxe. On constate alors que la différence entre h et he est quasiment proportionnelle à la déclinaison: (h-he)/d >< constante. Si, en plus, on calcule la déclinaison notée D du jour pour lequel le lever du soleil intervient au moment de la valeur H de l'angle horaire, alors on constate encore que la hauteur h est quasiment proportionnelle à la somme des déclinaisons d et D : h / (d+D) >< constante et que ces deux constantes sont très voisines.
Voilà qui justifie le tracé de lignes horaires rectilignes puisque l'abaque met précisément en œuvre l'une ou l'autre de ces deux relations équivalentes.
Les coefficients de proportionnalité varient de 1 pour la ligne de midi à 0.72 pour la ligne de 6h. Sur la figure on s'aperçoit bien que la pente des "droites" diminue. Pour la latitude de 47° l'écart entre lignes vraies et droites varie de 1.3% à 5.3% (à 9h) seulement.
Pour concevoir un tel instrument point n'est besoin de pratiquer les fonctions trigonométriques, seulement de connaître les valeurs de la déclinaison au cours de l'année. Ce n'est donc pas étonnant que l'on fasse remonter l'origine de l'anneau de paysan à la Rome Impériale.
Mais l'anneau de paysan a-il été inventé par un paysan, un berger ou un astronome?
anneau de paysan vente privatelot.com |
Un autre objet utilise l'ombre rasante d'un style horizontal sur un disque suspendu. On fait alors une hypothèse pour optimiser la précision. La solution retenue, (J.N. Tardy "cadrans solaires"), consiste à faire en sorte que l'objet, pour chaque jour, donne l'heure exacte à 9h. Il suffit pour cela d'adapter le point de suspension.
disque solaire |
La fonction donnant la valeur de l'angle de déviation du point de suspension est: arcsin(cosl.cosd.cos(45°)+sinl.sind)-arcsin(cosd.cos(45°)).
C'est une fonction presque linéaire qui donne, pour la latitude 47° , la valeur +18.3° au solstice d'été et -20.1° au solstice d'hiver.
Il suffit alors de repérer sur le haut du disque le point de suspension à retenir en fonction de la date.
Ensuite le calcul permet de tracer les lignes horaires par point.
L'hypothèse du calage sur l'instant de 9h peut être mise en œuvre dans une variation élaborée de l'anneau de paysan appelée bague solaire.
On dispose dans l'anneau lui-même une bague coulissante qui permet de donner à la lumière une position variable en fonction de la date.
bague solaire et abaque gravé à l'intérieur |
La construction des positions de la lumière pour une date à 9h répond à une formule très simple. L'angle au centre d'un tel point, mesuré depuis le point de base (ici marqué 9h), est égal à 90°+2.h où h est la hauteur du soleil à 9h ce jour-là.
On peut noter qu'à la latitude de 47°, le premier mars à 9h le soleil est à la hauteur de 22.5° et que l'angle au centre vaut alors 90°+45°, soit 135°: la lumière correspondante est donc sur l'horizontale passant par le centre...
L'abaque donnant l'heure peut être construit en joignant les points horaires calculés par des segments de droite ce qui induit un écart assez peu important entre 6h et 10h30. Cet écart semble avoir été négligé par les fabricants puisqu'on trouve des spécimens où l'abaque est réduit à la ligne de l'équinoxe. Il est préférable de calculer par points les courbes, en vert ci-dessus. Et, compte tenu des hypothèses de départ, ce n'est pas un hasard si ces courbes sont voisines de celles du disque solaire.
L'heure de lever du soleil est donnée par l'horizontale passant par la lumière et doit être lue sur l'abaque en vert.
Sur cet abaque est également tracée en violet la ligne donnant les heures de lever et coucher tout au long de l'année, la partie située à gauche de l'abaque peut donc ne pas être tracée.
Cet objet, très répandu par le passé semble-t-il, avec lumière coulissante, reste un bel ensemble gnomonique.
A quand la construction d'une bague de géant posée sur un support orientable?
réplique wikipedia |